Une campeuse est retrouvée morte un matin, les gendarmes n'enquêtent pas, ça ressemble à une mort naturelle qu'ils disent, elle ressemble à une clocharde. Elle s'appelle Mona, ( Sandrine Bonnaire ), elle campe en hiver, « c'est pas banal », ils disent tous. Une est persuadée que ça s'arrangera quand un garçon voudra bien d'elle. Ils pensent que c'est leur changement d'époque, ils ont leur fille qui fait plus de moto que leurs fils et ça leur saute auxyeux. Les fenêtres et les portes se claquent à son passage, elle mourra en claquant des dents de froid ; au final c'est vrai qu'elle est morte de froid et de faim en France à la fin du XX e siècle. Agnès Varda comme toujours pense la réalité de son image aussi dans sa dimension documentaire. Nous avons donc comme personnage Mona sans toit ni loi, le marocain qui l'a trouve, un gendarme, un autre, un paysan interrogé, un autre, brûleur de fossé, le premier motard, l'autre, Paulo, amant de Yolande, le démolisseur, la jeune fille à la pompe, le vieux aux allumettes, le fossoyeur, le jeune homme qui lui paye un sandwich, le garagiste, son fils, la vieille tante Lydie, sa bonne Yolande, son oncle Aimé Bionnet, David le juif errant, les bergers qui ont plaqué la philosophie pour aller traire des chèvres dans la campagne, la pute sur la route, la vieille dame, la platanologue, le régisseur, l'ingénieur agronome élève de la platanologue et neveu de Lydie, sa femme Eliane, le routard qui donne son sang, l'infirmier, le maçon au bonnet rond, le régisseur des caisses, Assoun le tailleur de vignes, le régisseur du mas, sa femme à la lessive, la voyageuse méfiante, le zonard-mac de la gare, sa zonarde, le petit monsieur bien-mis qui lui dit « mais nous sommes frères ! », le racketeur du photomaton, le racketé ...ils l'a croisent ou la recroisent, ne savent rien d'elle, ou si peu, à peine son nom, ou qu'elle a eu le bac, ou qu'elle a été secrétaire-dactylo, et que ça l'a emmerdé. Agnès Varda rassemble des témoignages de ceux qui ont croisé sa route pour retisser l'histoire de ses derniers jours, de ses dernières semaines. L'homme-des-bois, violent. Il la viole ? On ne voit pas la fin de l'altercation. Sous le fait divers apparent, le drame bien sûr. Entourée de femems qui ne bougent pa sinon entre la lessive et la télévision, voire, pour la plus privilégiée, l'universitaire, les colloques à Marseille, Mona roule, marche, fait du stop, elle n'a aucun but, aucune envie, aucun désir, aucune aspiration, elle prend le mot liberté et elle se déplace, elle circule, elle bouge. Varda n'a pas cherché à comprendre ses personnages, leurs liens sociaux, leurs sociabilités. Elle avait deux pages de scénario et elle est allée fréquenter ses paysages, elle s'est déplacée, elle a circulait, elle a bougeait, elle a trouvait l'histoire sur place. Varda n'a pas forcée la fiction. Il n'y a ici aucune bonne histoire, aucune symbiose, quelques recoupements certes, l'élève de la platonologue est aussi le neveu de Lydie, mais ce sont plein de petits bouts de chemins assemblés qui sont réunis à l'image ici. C'est l'histoire d'une femme seule. On lui prédit de mourir tant que sa situation initiale ne connaîtrait pas d'élément perturbateur probant. Elle meurt de froid au sud dela France un hiver du XX e siècle et son potentiel mac dira d'elle en épitaphe : « Elle s'est tirée. Ah la conne elle baisait bien, j'aurai même pu gagner du fric avec elle, maintenant il me reste l'autre mais elle discute trop, avec ses tirades anti-société ça me fait débander tiens elle est chiante. Je l'a regrette la Mona, elle avait un sacré cul. »
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