D’un père historien d’art et d’une mère pianiste, Marina Tsvétaïeva née le 26 septembre 1892 à Moscou compose
ses premiers vers en 1904. C’est pendant l’hiver 1918, alors que Marina Tsvétaïeva a 26 ans, qu’elle a le froid la faim et la solitude d’un Moscou en pleine guerre civile, qu’elle rédige ces scènes dramatiques en vers. Six petites pièces poétiques en proie à l’amour et à la tempête dans un XVIIIe siècle de légende.
La tempête de neige présente la dame à la cape, 20 ans, « allure un peu garçonnière », dans la nuit du nouvel an 1830 dans les forêts de Bohême. « Du café? Au diable ! Apporte du vin! » s’écrie une vieille dame échauffée parlant toute seule. Son temps était meilleur que le XIXe. Toujours en parlant du vin « le meilleur, c’est nous qui l’avons bu, Monsieur ! Quelle incivilité ! De la bière ! En présence des dames ! ». Elle médite.
« Une vache avec une cape
De nos jours, c’est réalité ».
Le marchand l’interroge : « vous preniez garde à vous comme des nonnes ? »
Ça inspire la vieille.
« Non ! - Nous embrassions tant et plus !
Nous griffonnions sur des papiers
Des vers sur la passion fatale !
Que de laquais dans l’antichambre, que de livres dorées,
Que de carrosses devant le perron !
Encore aujourd’hui j’en ai des frissons,
Moi, toute chenue !
Jeune - aimable - couvert de médailles... »
La vieille répond en miroir à la jeunesse de la dame un peu garçonnière, un peu moderne, un peu XIXe siècle. La dame, c’est la comtesse Lanska.
« Reine déchue - En cape d’homme,
Dans la folle tempête - loin des folies des bals ! »
« Ah, du sang bleu! » s’écrie le monsieur. « Et après ? Du sang jeune plutôt! »
La dame, la comtesse : « Je ne suis pas un héros. »
Le même monsieur lui répondra : « Non, mieux : vous êtes une héroïne [ ... ] écartez vous ! Vous allez bruler vos cheveux ! »
La dame : « Ne craignez rien pour moi ! Je suis moi-même Feu. »
Et de conclure ainsi :
« Tu es femme, tu ne te souviens pas ...
Tu ne te souviens pas ! ... Il ne faut pas ...
A l’errante - Le songe.
A l’errant - Le chemin.
Souviens-toi : oublie ! »
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